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III. EPOQUE FEODALE
Le Castellar
appartient au Marquisat de Saluces "fédéré" comme ses
voisins au sein du Saint Empire Romain Germanique.
Saint Empire Romain Germanique
Primitivement
rattaché à Turin, ce territoire devient vassal du Dauphiné
en 1210.
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Marquisat de Saluces,
vassal du Dauphiné
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En bleu, la partie dauphinoise, entre
les deux Varaita
de Bellino et de Chianale, vers 1200
A cette
époque, l'une des trois routes commerciales importantes permettant
le transit vers la Provence et le Dauphiné empruntait le Castellar
(MC Daviso di Charvensod. I Pedaggi delle Alpi Occidentali nel Medio Evo.
Torino 1961 p 326)
Le problème de la langue
et du peuplement
Comme partout
en Europe, la seule langue officielle demeure le Latin pendant que comme
en Dauphiné la langue parlée, issue du Bas-Latin demeure le
Vivaro-Alpin.
Ce parler,
dont la formation demeure mal connue, se rattache phonétiquement et
lexicologique ment au groupe roman dit de langue d'Oc (ad hoc) utilisé
dans tout le Sud de la France.
Une grammaire
"occitane" sera écrite dans la région de Toulouse, mais le
parler officiel demeure généralement le Latin.
Seuls quelques
mots subsistent des idiomes antérieurs (noms de lieux essentiellement
).
En Piémont,
seule la partie montagneuse s'exprime en langue d'Oc et nul ne peut préciser
la raison d'une aussi étrange frontière linguistique, située
au pied des montagnes.
Selon Auguste
BRUN (théorie des substrats), la limite des parlers d'Oc s'expliquerait
éthniquement par des conditions préhistoriques de peuplement,
différentes au Nord et au Sud de la Gaule.
Selon WALTER
von WARTBURG (Théorie des superstrats), le Gallo-Romain aurait
été sensiblement uniforme avant les grandes invasions et se
serait différencié dans le Nord de la France sous l'influence
des parlers germaniques employés par les Francs et les Burgondes.
Plus récemment,
selon l'Allemand BODO MULLER, il convient encore pour expliquer les limites
du parler d'Oc, de considérer que les relations s'entretenaient par
les collines et montagnes et de rechercher les régions rebelles à
toute colonisation et notamment le lits de fleuves autrefois marécageux
(Loire, Garonne, Pô)
("La Langue Occitane"
Pierre BEC, Presses universitaires de France)
En Castellar,
si l'on examine le cours du Pô, cette dernière théorie
paraît expliquer l'usage de la langue d'Oc de manière assez
satisfaisante.
En fait, bien
peu d'éléments permettent d'imaginer le Castellar à
l'époque féodale.
Imaginons
une région sauvage, inhospitalière, peuplée de quelques
tribus sans doute peu romanisées ou même seulement de quelques
chasseurs et bergers.
Il convenait
sans doute de frayer aux acteurs d'un commerce pratiqué à dos
de mulet quelques passages sûrs et bien évidemment organiser
çà et là des relais fiables assurant vivres et hébergement.
Du IX ème
au XI ème siècle, les seigneurs accordaient souvent des concessions
à des " abbés " (Religieux ou laiques) afin de permettre le
défrichement des terres incultes.
Des ordres
hospitaliers s'étaient donné pour mission d'accueillir pèlerins
et voyageurs en telles contrées.
Là,
la vie s'organisait autour d'une petite église et d'un prieuré
pendant que les habitations des paysans, généralement en bois
ou en paille se serraient tout autour.
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Clocher roman "Rua la Glheiso"
Bellino
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Bénitier roman.
Le monstre couronné d'épines
maintient un
animal ou être humain entre
ses griffes.
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Dans nos
vallées, six grandes abbayes bénédictines contribuent
au peuplement et à la mise en valeur de la région.
L'on sait
que leur influence fut prépondérante sur l'art médiéval
de la montagne.
Peut-être
faut-il rechercher dans cette colonisation le fondement d'une partie au moins
de nos villages? ("L'Art du Moyen-âge dans les Alpes
méridionales" Luc F Thevenon)
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La vierge en majesté
de la Rua la Glheiso
(Bellino) témoigne des communautés
médiévales de la vallée
vers le
XIIe siècle.
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La vierge en majecté
d'Arvieux (Qeyras),
semblable à celle de la Rua
la Glheiso,
paraît issue des mains du même
sculpteur.
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Les vestiges
d'églises romanes de petites dimensions souvent ornées de "bandes
lombardes" telles St Eusèbe, Borgata Chiesa et Chianale, de maisons
à fenêtres geminées laissent facilement imaginer les
petites communautés de ces colons peut-être venus d'ailleurs.
Nombre de
noms de lieu ou même d’institutions attestent eux aussi de l’existence
de telles concessions en nos vallées (Les " MANSES " " CABANNERIES
" " BORDERIES " " FAUCHEREES " du Dauphiné sont à rapprocher
de " MAI DI BARNA " , " CHAZAL ", " CHABOTTE " , " PRA FAUCHIER " et
surtout MASSIER désignant le responsable d’un hameau etc…
Une étude
anthropologique réalisée par l'Université de Turin a
conclu en 1973 à "l'existence d'une structure non homogène
de la population"
"Ce fait
peut indiquer que la population originaire provient d'au moins deux groupes
différents" ("Popolamento e spopolamento di una valle
alpina " Unione antropologica italiana 1976)
Certaines
"Curtis" (villages correspondant à des concessions seigneuriales),
éloignées de tout pouvoir jouissaient souvent d'une réelle
autonomie et des droits ou prérogatives portant sur la jouissance
des moulins, ponts, canaux ou autre pouvaient leur être consentis.
("Medievo" De Agostini,
Luglio 1999)
Le Castellar
constituerait ainsi un "escarton" destiné à répartir
les charges entre diverses communautés.
En effet
,en ces lieux difficiles d'accès, le prince y déléguait
souvent ses prérogatives sous forme de chartes organisant une sorte
de partage des pouvoirs.
L'impôt
pouvait être par exemple prélevé globalement par commune,
chaque commune étant elle-même investie de la répartition
par famille.
Peut on
succomber à la tentation et et voir en ces zones de " non droit
" un environnement favorable à l’immigration d’élites indésirables
et hérétiques persécutés en d’autres citées
?
L’inclinaison
et goût des montagnard pour la culture et les choses de l’esprit permettent
de s’interroger , mais ,faute de preuves le mystère demeure entier
.
Plus précisément
- En
1210 ,la Comtesse ALASIE fait hommage du Marquisat de SALUCES à GUIGUES
,DAUPHIN de VIENNE et le Castellar suivra dé lors le sort du DAUPHINE
pour plusieurs sièles .
Reconstitution de maison médiévale
de notable
dotée de son "mur façade"
typique du versant oriental des Alpes
Dessin Christophe Bernard.
Le problème vaudois
En 1184, sans
doute à la faveur de la faiblesse du pouvoir politique, la religion
vaudoise s'installe dans le Dauphiné auquel appartient le Castellar
dés 1210 .
Des prédicateurs
dénommés "Barbes" (Barbo en dialecte alpin) déguisés
en marchands prêchent depuis Lyon la Bonne Nouvelle. (Peut-être
leur doit-on cet usage des rubans et foulards de soie si caractéristique
du Castellar)
Malgré
l'affirmation de Jalla, ("Histoire des Vaudois" p 153)
, nul ne peut prouver cet enracinement.
Comme l'atteste
le testament de Barthélémy ARNAUD l'aîné (
Gap, archives départementales 1E 4880, 20R-24R), la vallée
fut,à Bellino , jusqu'en 1595 le berceau de la famille du très
célèbre Henri Arnaud, colonel des Vaudois, artisan de la "glorieuse
rentrée" de 1689 pendant que des "Gallian" de Blins paraissent bien
avoir émigré en des lieux d'exil propres à ces mêmes
adeptes de Valdo. (Recherches de Jean GALLIAN - Cagnes sur
mer)
Portrait d'Henri Arnaud par Brandon et
La Feuille
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