|
Chapitre XVI.
Peuplement alpin maximum.
Un peuplement important des Alpes.
La période 1800 - 1850 est celle de plus fort peuplement des Alpes.
En Queyras, on exploite les terres cultivables jusqu’à 2200m principalement
pour le seigle et l’orge. Abondance du bétail entraîne une utilisation
intensive du fumier.
En 1845, le chemin du Queyras est rendu
carrossable, surmontant l’obstacle des gorges du Guil et un an plus tard,
on lance le projet de ligne ferroviaire de Turin à Gênes.
Bellino compte 1.086 habitants, en 1838, et atteint son peuplement
maximum vers 1870. Nul doute que là aussi, les terres cultivables
remontent bien haut vers les sommets et que l’élevage des vaches et
des moutons entraîne la construction des «albergs» près
des sommets, comme à Vautour ou aux granges de l’Autaret.
Les voies de communications de nos vallées ne sont pas fameuses. En
Ubaye, par exemple, quand le sous-préfet de 1841 acheta une voiture
à deux roues, il fallut l'amener démontée, à
dos de mulet, et le roulage n'atteignit Barcelonnette qu'en 1848. Grosse différence
avec la vallée de la Durance, mais qui n'empêchait nullement
l'économie rurale de connaître un beau développement agricole
et pastoral, ni les montagnards de courir le monde.
“La dernière phase de surpeuplement des Alpes a été
celle de la première moitié du XIXe siècle, après
les guerres de la Révolution et de l'Empire, avec la généralisation
de la pomme de terre et les premiers progrès économiques. La
population des Alpes (sans l'avant-pays) aurait alors légèrement
dépassé 1 million d'habitants, dont 47% pour les Alpes du Sud
et 53% pour les Alpes du Nord. Une très forte natalité, presque
partout supérieure à 30 pour 1000, laissait, malgré
une forte mortalité, des excédents naturels variant de
2 à 10%, suivant les secteurs, excédents qui iront s'amenuisant
au cours de la seconde moitié du siècle à cause d'une
baisse sensible de la fécondité et du vieillissement de la
population par émigration. Au milieu du XIXe siècle, les Alpes
rurales sont donc beaucoup plus peuplées qu'aujourd'hui ; ce peuplement
dense est à la fois la cause et la conséquence d'une organisation
rurale adaptée aux conditions anciennes de la montagne.” [20]
“Les traits spécifiquement montagnards, tels que la
prépondérance de l'élevage, le développement
précoce d'une démocratie rurale, la mise au point
d'une véritable civilisation de l'étagement
méritent une analyse complète, indispensable pour mieux comprendre
la part de l'agriculture, de l'élevage, de la forêt et des ressources
complémentaires dans cette économie traditionnelle qui connut
son apogée au milieu du XIXe siècle.”
L'autarcie de cette ancienne économie n'est pas spécifique
puisque partout les ruraux devaient plus ou moins produire eux-mêmes
ce qui était nécessaire à leur vie. De ce point de vue,
les montagnes n'étaient d'ailleurs pas les plus défavorisées.
Si elles récoltaient moins de blé que les plaines, elles élevaient
plus de bétail et, grâce à leurs minerais, à leurs
forêts, à leurs eaux motrices, à leur laine, possédaient
un éventail industriel assez étendu.
Les communautés de haute montagne, particulièrement, associaient
trois étages agricoles : le fond de vallée pour les cultures
et quelques prairies de fauche ; le niveau intermédiaire, brouté
au printemps, fauché l'été, brouté à l'automne
; l'alpage, dont parfois la partie inférieure pouvait être fauchée.
Trois niveaux d'habitat répondaient aux trois niveaux d'exploitation.
L'étagement explique les multiples migrations des hommes et
des animaux : montée aux alpages, directe ou avec un étage
intermédiaire, descente symétrique à l'automne ; déplacements
d'hiver pour consommer le foin entassé dans des granges ; transhumance
d'hiver en direction des régions basses, ayant pour corollaire l'été
la montée des troupeaux provençaux ; migrations de travail
des hommes, quelquefois l'été (faucheurs, moissonneurs,
bergers, fromagers, maçons), surtout l'hiver
(petits métiers, commerces ambulants). Ce mouvement perpétuel
était l'une des conditions de survie d'une population trop nombreuse
pour les ressources d'un seul étage, d'un seul terroir ou d'une trop
courte saison d'été.
Tandis que l'agriculture se trouvait plus à l'aise dans les plaines
et plateaux de la montagne, l'élevage gagnait avec l'altitude.
Essentiellement nourricière, l'agriculture ajoutait aux céréales
(blé jusque vers 800 m, seigle, orge) la vigne (jusqu'à 1000
m ), les légumes (la pomme de terre), les plantes textiles (chanvre,
lin, mûrier à soie dans le bas), les arbres à cidre (poirier
plus que pommier), les arbres à huile (noyer, amandier, olivier au
sud). Le nord suivait l'assolement triennal (céréale d'hiver,
céréale de printemps, jachère), le sud l'assolement
biennal blé-jachère (qui était aussi un dry-farming avant
la lettre).” [20]
Mais l’ouverture de routes, comme celle des gorges du Guil, en Queyras,
rompt l’équilibre économique qui reposait sur une stricte
autarcie. Le progrès entre dans nos vallées qui vont commencer
à se dépeupler [53].
Dans les Alpes-Maritimes, on construit les routes des vallées, en
Vésubie, en Tinée, et la Basse Corniche sur le bord de mer.
Les cadrans solaires de Blins
La commune de Bellino s'orne de nombreux cadrans solaires qui sont autant
de citations locales. Récemment restaurés sur des fonds européens,
ils sont un exemple de tradition locale. On en compte 32 dans les principaux
hameaux de Chiesa, Prafauchier, Celle, Chiazale et S. Anne.
Mon arrière-grand-père paternel, Levet Giovanni Antonio (1857-1935),
"Conciliatore del' Comune di Bellino en 1896, sous le Roi d'Italie Umberto
Ier, est l'auteur de quelques cadrans solaires, signés de son nom,
entre autres celui de la façade de l'église située à
l'entrée de Chiazale, ce qui lui vaut d'être honoré par
le musée de Bellino ouvert en 2005. On se reportera à la généalgie
familiale pour connaître ses autres réalisations.
Suite
© Copyright
JG
|
|