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Chapitre XX.
GUERRE FRANCO-SAVOYARDE (1590 –1600) .
Guerre en Provence.
Poussé par l’Espagne, avec l’accord du pape et avec la promesse
des catholiques provençaux pour le reconnaître comme leur comte
et seigneur, le duc de Savoie s’engage dans une conquête de la Provence.
[72] Charles Emmanuel Ier rallume la guerre avec la France, prend
part aux luttes qui déchirent les Ligueurs et les Huguenots et envahit
la Provence en 1590, afin d’affirmer ses droits à la couronne de France,
puisque petit-fils de François Ier par les femmes.
Arrivé à Aix, le duc de Savoie se fait reconnaître
“protecteur et commandant en chef en Provence, pour conserver la province
dans la religion catholique à la couronne de France” [21]. Il est
battu à Vinon (1591), revient à Aix pendant que le bassin
du Var se révolte. Le 30 mars, il retourne à Nice, après
avoir sacrifié 5000 espagnols et piémontais, son artillerie,
un million d’écus et joué de malheur.
Lesdiguières contre le
duc de Savoie.
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Pendant ce temps, en 1592, Lesdiguières décide de prendre
le marquisat de Saluces. Avec 3.500 hommes d’infanterie et 600 de cavalerie
il occupe le bourg de la Perouze, descend à Pignerol. Le duc de Savoie
est attaqué près de Turin et perd 700 hommes et 6 drapeaux
alors qu’il n’en coûte que 12 hommes pour Lesdiguières.[35]
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Ce dernier passe alors dans la vallée de Château-Dauphin pour
s’assurer, au besoin, le col Laniel (Agnel) ; n’étant pas en force
suffisante pour occuper la plaine, il laisse une garnison à la tour
du pont, où il défait un corps de 800 sardes.[35]
Le 11 octobre 1593, la châtellenie
de Château-Dauphin n'ayant pas réglé la part qu'elle
doit pour l'étape du Queyras, ses délégués sont
retenus prisonniers par Esprit Puy, sergent royal (33).
Le duc de Guise, pour le compte
d’Henri IV, rallie tous les partis de Provence (1594) et Mirabeau, pour
la Ligue, s’empare des passages du comté de Barcelonnette et du col
de l’Argentière. Lesdiguières, revenu dans le Dauphiné,
excelle dans les sièges (fort Barraux en 1598, Montmélian)
[55]. Les troupes de Charles Emmanuel, pressées de toute part, se
font battre dans la Maurienne (1597), puis à Turin. [52]
En 1595, Emmanuel Philibert
obtient le rattachement des vallées de Maro et de Préla dans
l’arrière pays d’Onaglia, puis l’année suivante celui de la
Principauté d’Onaglia, contrôlant ainsi, en territoire génois,
une importante enclave. Mais il échoue sur Pornassio qui lui aurait
donné accès à un col beaucoup plus bas.|49]
En 1597, un détachement
français de 500 hommes part de Guillestre et se rend par le
col Agnel à la Tour de Pont et à Château-Dauphin pour
obliger les habitants à payer les impositions dont on les avait chargés.
La châtellenie française
de la vallée de la Varaita eut beaucoup à souffrir pendant
ces guerres de religion. En 1598 Bellin (Bellino), Pont-Chanal, Château-Dauphin
et les deux vallées furent pillés, incendiés, et tellement
saccagés, que pour leur donner le temps de se relever de pareils
désastres, on les déchargea de tout impôt pendant dix
ans.
La paix est conclue à
Vervins le 2 mai 1598 et le pape est chargé de conclure sur l’avenir
du marquisat de Saluces toujours occupé par la Savoie. Le roi de
France propose de céder Saluces à la Savoie contre la Bresse,
Barcelonnette, les vallées de la Stura et de Pérouse et Pignerol.
Charles Emmanuel ne répond pas à cette demande. [72]
Henri IV et Sully, menacés par l’Autriche-Espagne qui domine toute
la Méditerranée, commencent, en 1599, à attaquer leurs
alliés : ils réclament le marquisat de Saluces à Charles
Emmanuel, puis font envahir la Savoie. Lesdiguiéres après Montmélian,
reprend la Maurienne et la Tarentaise qui deviennent vallées françaises.
Le duc de Guise, gouverneur de Provence, met le midi en état de défense
: 12.000 Provençaux franchissent le Var et se présentent aux
pieds des murs de Nice. Les Provençaux du duc de Guise doivent cependant
lever le siège.[52]
Le Traité de Paris
(1601) règle le problème du marquisat de Saluces. Mais les
complots savoyards et les négociations secrètes avec l’Espagne
rendent le roi de France furieux. Au Traité de Lyon (1601),
la Bresse, le Bugey, le Valmorey et Gex passent à la France . Le
marquisat de Saluces retourne à la Savoie, la Castellata reste française.
On dit que Lesdiguières, apprenant les conclusions de ce traité
s’exclama « Henri IV s’est conduit en vrai marchand ; Charles
Emmanuel, lui, s’est conduit comme un roi » [72]
Charles Emmanuel s’allie alors avec la France (1610) pour s’étendre
vers l’Italie, en particulier pour la conquête du Milanais (espagnol).
Mais Henri IV de France est assassiné et le projet n’a pas de suite.
La Savoie tente d’envahir le duché de Montferrat (1613). Charles
Emmanuel et la Savoie, petit état au milieu des grands, force l’admiration
de toute l’Italie par sa capacité à bien gérer son
Etat.
La succession de Montferrat, pour laquelle le duc de Savoie a des droits par
sa fille, l’oppose à l’Espagne. La France est de son côté.
On se bat de 1614 à 1617 pour, finalement, signer la paix sans résultat.
[72]
En Dauphiné, Lesdiguières s’attache à maintenir la
paix civile et à remettre en route la vie économique. Lieutenant-général
du Dauphiné, il gère les affaires avec une grande habileté
et une impitoyable rigueur. Il impose aux protestants, comme aux catholiques
la coexistence prévue par l’Edit de Nantes, souvent mal acceptée.
Il lance de grands travaux d’urbanisme et de fortification qui créent
des emplois et ramènent la production. Seigneur de nombreux fiefs,
richissime propriétaire, il devient un des plus puissants personnages
du royaume. Son adjuration en 1622, lui permettra d’obtenir l’épée
de connétable, honneur suprême. Il sera le dernier à
porter ce titre. [55]
En 1626, allié de la France, le duc de Savoie gagne le comté
de Beuil, après l’exécution de son dernier comte, Annibal
Grimaldi, gouverneur de Nice qui l’a trahit en cherchant la protection du
roi d’Espagne, puis celle de Louis XIII. Ainsi finit le comte de Beuil, dont
les ancêtres avaient pourtant donné Nice à la Savoie.
[52]. Les forteresses du comté sont rasées et les terres distribuées
à une nouvelle noblesse niçoise restée fidèle.
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