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Les seigneurs de
Modène
Boson II, comte de Provence
aurait donné la seigneurie de Modène à la Maison
de Mormoiron Elle la conserva au moins jusqu’en 1279. Elle passa ensuite
aux Raimond. Bertrand de Raimond rendit hommage en 1362 au recteur du
Comtat Philippe de Cabassole.
Philippine de Mormoiron,
héritière de sa famille, fit passer les seigneuries
de Modène, d’Urban, de la Roque-Alric et une partie de
Caumont à son époux Geoffroy de Venasque en 1421. Ce dernier
fut régent du Comtat l’année suivante, puis viguier
de Marseille (1427)..
La seigneurie de Modène
ne resta pas longtemps aux Venasque, car cette maison s’éteignit
trois générations plus tard avec Marie de Venasque. Ses
biens considérables passèrent alors à son époux
Jean de Raimond, qui récupéra ainsi ce que sa famille
avait perdu quelques années auparavant. Il était écuyer
du roi Louis XI et devint ainsi seigneur de Modène et des autres
seigneuries contadines.
Son fils François
fut le premier à prendre le nom de Raimond-de-Mourmoiron.
Les Raimond-de-Mourmoiron de
Modène
Ce François de
Raimond de Mourmoiron eut deux épouses.
• La branche aînée, issue de
la première épouse, conserva la seigneurie de Modène
jusquen 1620 date à laquelle Marie Raimond de Montlaur, comtesse
de Montlaur, baronne d’Aubenas et de Maubec, la céda à
son cousin François dit "Gros Modène".
• La branche cadette, issue de la seconde
épouse, eut d’Urban, la Roque-Alric et un peu plus tard "Gros
Modène" reçut la baronnie de Modène,
"Gros Modène"
: François Raimond de son vrai nom, est né en 1570 et
se maria à Carpentras. Il fut appelé à la cour
par son parent, le connétable de Luynes et y resta quatre ans.
Il fit une brillante carrière et fut Conseiller d’Etat en 1617
et Grand-prévôt de France en 1620. Revenu sur ces terres
comtadines il n’était pas homme à s’occuper de ses terres.
En particulier il avait un domaine à Saint-Pierre-de-Vassols,
appelé La Souquetto, qui lui venait de son père, composé
d’une grange « en six membres », qui avait été
un moulin et de terres et prairies à l’arrosage (puisqu’il y avait
eu un moulin), d’une contenance totale d’une quinzaine d’hectares.
Les gens du pays disaient _et peut-être disent encore_ en parlant
de la Souquetto, « acò ei de boun bèn. » :
c’est de la bonne terre. Il avait aussi des terres appelés les
Barattes
Il eut 4 enfants dont
le fameux Esprit de Raimond-Modène (1608-1673), dit "le comte
de Modène", qui fut un esprit cultivé . On lui doit quelques
poésies dont la satire « Peinture du pays d’Adrousias »
déjà citée dans le tome 1 de l’histoire de Caromb
[165].
Esprit de
Raimond-Modène né à Sarrians en 1608, fut élevé
à la cour par son père. Il joua avec le frère du
futur roi Louis XIII, Gaston d’Orléans, qui était de son
âge. Il devint ensuite son page et lui resta très attaché
au point d’être son chambellan en 1634. Il eut une vie sentimentale
très agitée. Il avait épousé en 1630, à
l’âge de 22 ans, une veuve un peu mûre (quadragénaire),
Marguerite de la Baume-Suze. Elle était veuve d’Henri de Beaumanoir
(décédé en 1620). Il en eut un fils, Gaston en
1631.
La vie de la Cour aidant,
il délaissa son épouse et tomba amoureux de la jeune et
belle Madeleine Béjart, tout juste 19 ans, et déjà
comédienne. Il fut son amant affiché pendant les années
1637 et 1638. Il lui fit un enfant, une fille nommée Françoise,
née le 3 juillet 1638, qu’il reconnût ouvertement, mais qui
mourût peu après la naissance.
Vous
avez reconnu, bien sûr, le nom de Béjart, qui est inséparable
du nom de Molière. En effet, Molière épousera
Armande Béjart, la fille de Madeleine, son ancienne maîtresse.
Molière
fut injustement accusé d’avoir épousé sa propre
fille. Louis XIV mit un terme à cette calomnie en devenant parrain
de leur premier enfant.
Esprit
quitta Madeleine Béjart comme il avait quitté son épouse
officielle, toujours vivante, et partit faire la guerre en Flandres
contre Richelieu où il fut blessé en 1641.
Madeleine Béjart, maîtresse d’Esprit de Modène.
Soigné
à Modène et remis de ses blessures, il suivit le duc
de Guise en Italie (1646) puis à Paris. Devenu chambellan du
duc, il l’accompagna à Naples où il eut d’abord quelques
succès militaires inespérés. Mais accusé
de trahison il fut jeté en prison (1648).
Libéré
26 mois plus tard, il revint à Paris partiellement ruiné
par son expédition napolitaine. Il avait la goutte et employa
à nouveau le couple Lhermite qui ne demandait que cela. Il prit
pour maîtresse la femme Lhermitte, sa domestique qui savait le
soigner et combler ses désirs. Le mari de celle-ci fermait les
yeux sur les assiduités de sa femme auprès de son maître
et savait s’éclipser au bon moment. Dame Lhermine eût un
enfant, une fille, sans que l’on sache vraiment de qui, de son mari ou
d’Esprit, mais il est peu probable qu’Esprit en fut le père.
Très interressée,
cette dame Lhermite se fit donner, par Esprit de Raimond, qui n’avait
que peu d’argent, la terre de La Souquetto à Saint-Pierre-de-Vassols.
C’était le prix de ses complaisances, prix réglé
comme une vente devant notaire en 1644. Le mari Lhermite stipula dans
l’acte « qu’il n’avait rien à prétendre sur ces terres
encore qu’elles aient été acquises sous le nom de sa femme
». Trop fier pour travailler la terre, trop paresseux pour en diriger
l’exploitation, intrigant et aventurier, il considéra ce bien
comme une monnaie d’échange. Par nécessité et n’ayant
pas d’autres moyens de s’acquitter d’une dette, il la vendit à
Madeleine Béjart en 1661, par devant notaire, à Paris, pour
la somme de 1850 livres.
Dame Lhermite continua
à intriguer et finalement ménagea un mariage entre Esprit
et sa propre fille qui venait de divorcer d’un premier mariage : le
26 octobre 1666, Esprit signa donc un contrat de mariage avec la fille
de son ancienne maîtresse, Madeleine Lhermite, de trente-deux
ans plus jeune que lui. Le haut et puissant comte de Modène fut
assisté pour la signature de ce contrat par le comte de Caravas,
l’écuyer de la duchesse douairière d’Orléans nommé
l’Hôpital, et par François de Chardonnet. Le mariage religieux
suivit le 15 décembre 1666, en l’église Saint-Paul de Paris
.
Source : Louis
Castre : M. de Modène,
Madeleine Béjart et Molière, 1934
La jeune comtesse de
Modène fit de nombreux séjours au château de Modène.
Malade et épuisé par son emprisonnement à Naples
où il avait été mal traité, Esprit au une
fin de vie difficile car son épouse n’était intéressée
que par ce qui lui restait de fortune. Il s’occupa alors de travaux
littéraires et historiques, publiant une « Histoire des
révolutions de la ville et du Royaume de Naples ». Il testa
le 7 décembre 1669 en faveur de « l’illustre dame Madeleine
Lhermite, sa très chère et bien aimée femme
», léguant cinq sous à son frère Charles
et à sa sœur Marie, autrement dit, pratiquement rien.
A la mort d’Esprit, son
épouse « possédait pour 25.920 livres de joyaux,
perles, pierreries, or et argent monnayé, vaisselle d’argent,
tapisseries, lits avecd leurs garnitures et autres meubles ».
Esprit mourut le 1er décembre
1669, en son château de Modène et fut inhumé en l’église
paroissiale.
Le lendemain de la mort du sieur de Modène, Charles de Raimond,
son frère, fit reconnaître par son fils et en son nom à
la Chambre apostolique, la seigneurie de Modène et ses dépendances,
se battit pour récupérer les biens familiaux, contesta
le testament de son frère, fit bloquer les revenus de la seigneurie
de Modène et fit appel à la chambre apostolique. Il commença
un procès contre Madeleine Lhermite, qui dura plusieurs années,
suivi d’un appel à la cour de Rome. Finalement il transigea en
1678 avec dame Lhermite et repris ses biens sauf 12.300 livres et une rente
viagère de 600 livres .
La Maison de Raimond-Modène,
ayant récupéré ses biens, conserva la seigneurie
de Modène jusqu’en 1796. Ses membres habitaient rue Moricelly à
Carpentras.
A u moment de la Révolution,
un des comtes de Modène, Charles Louis François Gabriel
de Raimond de Mormoiron passa au service de la Russie, se fit naturaliser,
épousa une princesse russe, Elizabeth Soltykoff, et eut 4 filles
dont l’une était dame d’honneur de l’impératrice de Russie.
La généalogie
de cette célèbre Maison du Comtat, pour ses diverses branches,
est donnée ci-après.
Jeton d’Espritde Modène montrant
les armes des Raimond.
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