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Chapitre VI.
Premiers signes de la Révolution.
Nos Vallées
ont d’autres préoccupations.
Noms, prénoms,
surnoms de nos vallées.
La population de Bellino
de 1770 à 1830.
Rattachement
le la Castellata au diocèse de Saluces.
Alors que du côté français on s’agite, que le parlement
résiste contre l’Eglise ou contre l’Etat, que l’on publie des écrits
licencieux, que le souffle de la liberté ébranle l’ordre social,
du côté des sardes et des niçois, c’est le calme. Charles
Emmanuel fait des concessions au peuple, comme la suppression des corvées
en 1769. Il améliore et perfectionne son Etat : l’établissement
des postes à Nice date de 1767. On y construit des hôpitaux
et on remet à jour les statistiques sur les habitants et les récoltes
pour établir des impôts plus justes.
Mais les idées changent, la Révolution se prépare.
Le roi, Louis XVI, bravant le parlement enregistre, d’autorité, des
édits de Justice. La révolte parlementaire gagne la province.
La gazette de l’époque nous raconte deux épisodes marquants
de notre région : La journée des Tuiles de Grenoble où
le peuple résiste aux édits royaux et les états provinciaux
de Vizille où les trois ordres du Dauphiné adoptent des revendications
communes (21 juillet 1788).
Des délégués du Grand Escarton participèrent
à l'assemblée de Vizille en 1788. Eux qui étaient déjà
en "république", eurent beaucoup de peine à expliquer qu'il
n'y avait pas les trois Ordres connus ailleurs. Mais, nous allons le voir,
ils durent se soumettrent, la République étant une et indivisible
et ils y perdirent leurs privilèges d'Hommes libres, de Francs
Bourgeois.
Nos Vallées ont d’autres
préoccupations.
Nos ancêtres ont d’autres soucis que la Révolution : le 10 janvier
1788, sur les 10 heures du matin, une grande avalanche roule sur le village
de La Chanal, écrase 43 maisons et 21 personnes périssent,
ainsi que 123 brebis, 25 vaches et 10 bêtes de somme. Les 21 personnes
sont ensevelies, 9 dans une tombe et 12 dans l’autre. Le roi, informé,
a la bonté d’envoyer 500 livres et monseigneur l’archevêque
de Turin, 100 livres, qu’ils reçoivent le 28 janvier. Catastrophe
épouvantable, décrite dans tous ses détails, qui excite
la pitié générale
(43)
.
Les Transitons du Queyras nous racontent tous les faits divers de ce temps
: les feux de village, en particulier n’étaient pas rares : 51 maisons
sont brûlées en 1889 à Ceillac, 108 maisons à
Aiguilles, à nouveau, la même année à. Ceillac.
Outre ces catastrophes, les transitons nous racontent les problèmes
rencontrés lors de la traversée du Col Agnel : «
L’an 1889, le 28 novembre, par un temps bien sec, mais par un froid très
rigoureux, trois hommes de Château Dauphin ont passé le col
Agnel, mais au lieu appelé les Geargeates, le plus âgé,
ayant 62 ans, fut transi par le froid et il a succombé. Son neveu,
âgé de 25 ans s’est gelé les mains et les pieds et le
troisième, plus robuste et accompagné du domestique qui demeurait
au refuge, qu’il était allé chercher, lui a sauvé la
vie »
(44)
Tout cela nous éloigne des préoccupations révolutionnaires,
mais c’était la vie de nos vallées.
Noms, prénoms, surnoms
de nos vallées.
Ouvrons une parenthèse sur les noms et les surnoms de nos familles.
Les Noms.
A Bellino, le nombre de noms de famille est très limité : les
dix noms les plus fréquents couvrent 90% de la population. Vers
1976, 20,6% des personnes s’appellent Richard, 16,6% sont des Gallian
et 14,9% sont des Levet. Les noms sont étymologiquement français,
ce qui s’explique par l’histoire de la haute vallée, et se distinguent
des noms utilisés dans les vallées adjacents ou vers le bas
de la vallée Varaita, prouvant l’isolement de la population pendant
longtemps.
Les Gallian sont nombreux à Celle, à Prafauchier, au Pleyne,
à Chiesa et à Ribiera. Ils sont devenus Galliano à
Sampeyre. Les Richard sont regroupés entre Celle et Chiesa. Ces deux
noms sont très peu présents à Casteldelfino et à
Pontechianale
Les surnoms.
Presque toutes les familles de Bellino (Blins) ont un surnom, ce qui
permet d'individualiser chaque personne lorsque le nombre de noms de famille
est limité. C’est vers la fin du XVIIIe siècle que certains
surnoms commencèrent à être notés sur les registres
de l’Etat Civil, alors tenus par les prêtres. Il est presque
certain qu'ils se seraient transformés en vrais noms de famille, si
à partir de 1838 l'évêque de Saluces n'avait pas prescrit
l'adoption de registres avec formulaires déjà tamponnés
dans lesquels leur indication n'était pas prévue.
Ces surnoms sont hérités selon un schéma patrilinéaire,
c’est à dire qu’ils sont transmis du père vers ses enfants,
avec une exception : lorsque la mère choisit un époux non-résident
de Bellino, c’est à dire sans surnom, ses enfants héritent
de son propre surnom ; ainsi, ils portent le nom du père et le surnom
de la mère.
Du point de vue étymologique, les surnoms sont en majorité
à consonance provençale et se réfèrent à
un type d’occupation, à un animal, ou à un lieu.
Il est difficile de définir l’origine de ces surnoms et l’époque
où ils ont commencés à être utilisés.
Sans traces écrites, sans leur présence dans les actes officiels,
ils se sont transmis oralement pendant au moins deux ou trois siècles.
Encore de nos jours, dans la diaspora bellinoise, ils servent à
identifier plus précisément une branche d’une famille.
Mais une hypothèse plausible est la nécessité de justifier,
auprès de l’église catholique, une certaine distance de parenté
entre futurs époux de même nom. Le taux élevé
de ces personnes est une conséquence de la possibilité très
limitée de choix matrimonial. Cela signifie-t-il un taux élevé
de mariages consanguins ? Nous verrons la réponse plus tard, grâce
aux études de l’Université de Turin.
En tout cas, le système de surnoms, dans la communauté, décourage
les mariages entre individus à étroit degré de parenté,
la société bellinoise admet les mariages entre personnes
de même nom si les surnoms sont différents.
Voir les surnoms dans la partie "généalogie de nos familles".
Les principaux prénoms de l’époque.
L’excellent ouvrage sur Tende analyse les registres de baptême où
sont inscrits les prénoms donnés au nouveau-né. Généralement,
les prénoms des parents se transmettent à l'aîné,
de père en fils ou, plus souvent par alternance de deux en deux
générations. Ainsi, à La Brigue, le premier fils porte
le prénom du grand-père paternel, le second celui du grand-père
maternel et le troisième celui du père. Une étude statistique
des prénoms portés à Tende au XVII le siècle
fait apparaître 71 % de prénoms simples et 29% de prénoms
composés. Mais si l'on ne considère que les personnes les
plus importantes du village, «les plus apparents», la proportion
des prénoms composés atteint approximativement 45%. Parmi
les prénoms masculins les plus usités, on peut signaler Giovanni
Battista (13,6%), Antonio (7,8%), Giovanni (7,1%), Giuseppe, Giacomo et Luca
(5,8%). Chez les femmes, les prénoms composés sont aussi très
fréquents, et pour les prénoms simples, Maria et Maddalena
sont parmi les plus répandus. De manière générale,
les mêmes prénoms reviennent donc très souvent ; Giovanni
entre, par exemple, dans la composition de 72% des prénoms composés,
et sur l'ensemble du XVIIIe siècle, on ne rencontre guère à
Tende qu'une cinquantaine de prénoms masculins. II faut noter enfin
que ces prénoms sont souvent modifiés par un diminutif ou parfois
oubliés au bénéfice d'un surnom ou d'un pseudonyme lorsqu'il
s'agit de bandits !
L’analyse des prénoms utilisés à Bellino fait un constat
identique : Giovanni est utilisé dans près de 30% des cas et
Giacomo dans 13%. Ppour les femmes, Marie représente 70 à 80%
des prénoms.
Les pratiques à Tende sont les même que celles du Val Varaita
et doivent sûrement couvrir toutes les Alpes Occidentales.
La population de Bellino de
1770 à 1830.
La population de Bellino, en 1789, connaît une croissance importante
depuis quelques dizaines d’années et cela va continuer jusqu’en
1830. Le gain annuel (Total du nombre de naissances diminué du nombre
de décès) est de l’ordre de 10 à 15 personnes. Sur
cette période longue de 50 ans, cela donnerait un gain de 500 à
750 personnes, soit presque un doublement de la population. Mais les départs
de la vallée, l’émigration, stabilise la population autour
d’un millier de personnes.
Rattachement le la Castellata au diocèse de Saluces.
Suite aux demandes des communautés de Château-Dauphin pour
le rattachement de leurs paroisses au diocèse de Saluces (1787), les
églises de la Castellata restèrent rattachès à
l'archevêché de Turin jusqu'en 1788. La demande de 1787, des
communautés de Casteldelfino, de Pont Chianale et de Bellino fut signé
par Joseph Antoine Berard, consul ; Marc Gallian, consul ; Chaffré
Peyrache ; consul ; Jean Baptiste Allais, Abraham Meyer, Claude Serre, Jacques
Gallian, Laurens Levet, Jacques Antoine Richard, Jean Perin, Bernard Gensanne,
Chaffré Fillie, Jean Antoine Falques, Seaffa? juge du Château
Dauphin et Pont et et juge plus voisin de Bellins et avec paraphe Mathieu
Lambert, Secrétaire de Pont et Chanal, Jean Etienne Bernard, secrétaire
.
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