Safran et luzerne.
Au début du XVIe siècle, l'agriculture locale subit une mutation
: la généralisation de la culture du safran et de la
luzerne mobilisent toutes les énergies.
Safran et luzerne se partagent les terres
cultivables avec les vignes.
En octobre 1668, on autorise le poids du Safran à Caromb et, au mois
d’avril suivant, on achète un marc (poids d une 1/2 livre) venant
de Lyon, pour le poids du safran.
Le 2 octobre 1718, “ceux qui cultivent le safran devront payer la dîme
à l’évêque lorsque les fleurs de safran passeront l’entrée
des portes de la ville”.
Sous Napoléon (1806), la culture du safran est pratiquée dans
nos villages, à Modène, Mourmoiron (sic) et Mazan. Le Vaucluse
en produit alors 5.000 kg, pour l’exportation [134].
Mûriers, vers à soie.
Le début du XVIe siècle voit l'arrivée de la culture
du mûrier blanc et le début de la production de la soie.
Villes et villages plantent leurs mûriers le long des routes.
La sériculture commence (Mazan en 1580, Aubignan en 1589). La prospérité
revient.
Sous Napoléon, notre campagne est couverte de mûriers blancs
et l’élevage du ver à soie s’est généralisé
dans toutes les familles de nos villages : 25 g de graines de vers à
soie donnent alors 20 kg de cocons, un rendement qui a diminué
de moitié par rapport à la période pré-révolutionnaire,
soit à cause de la qualité des feuilles de mûriers, soit
par l’importation de nouvelles graines de vers. Les cocons sont filés
ou tirés à Caromb, Malaucène, Bédoin, Mazan.
La soie est filée et ouvrée par les “moulins du Piémont”
à Carpentras, Pernes, Bédoin et Mazan, puis est exportée
vers Lyon et Nîmes. Le département de Vaucluse produit alors
60.000 kg de soie. Quelques ateliers assurent la teinture, à Carpentras,
Malaucène et Pernes.
Caromb met en adjudication les arbres des promenades publiques en 1844,
pour le ramassage des feuilles avant le 30 juin.
Le marché de la feuille de mûrier s’étend autour de
l’église.
Le conseil municipal donne avis favorable à la création d’un
marché de la feuille de mûrier à Pernes, qui aura lieu
tous les jours pendant “le cours de l’éducation des vers à
soie”, bien qu’un marché semblable existe à Caromb (1866), mais
donne un avis défavorable pour un tel marché à Carpentras
qui concurrencerait de trop Caromb, Mazan et Sarrians (1871). L’année
suivante, le conseil demande la création d’un marché de cocons
à Caromb et aussi d’un marché aux fruits.
La campagne carombaise est très morcelée, en de nombreuses
parcelles familiales séparées par des haies d'aubépines,
de cannes, de roseaux, de jonc qui prolifèrent dans l'humidité
des ruisseaux d'arrosage ( "maires"). Des mûriers ont été
plantés un peu partout.
La période
1860-1890.
L'élevage des vers à soie, les quelques filatures carombaises
qui emploient jusqu'à 100 ouvrières, et le marché de
feuilles de mûrier vont disparaître devant les soies orientales
qui cassent le marché de la soierie locale.
En décembre 1884, le nouvel observatoire du sommet du Mont Ventoux
possède une grande salle vitrée au rez-de-chaussée pour
l'hivernage des graines de vers à soie.
Vers 1900.
La commune compte encore 200 éleveurs et récolte près
de dix tonnes de cocons, chacun fournissant environ 2 kilomètres de
fils de soie. Une belle production qui rapporte gros et contribue à
la prospérité du village. A cela, il faut ajouter
les 30.000 kg de cocons étrangers filés dans nos filatures,
ce qui représente un travail considérable.
Au début du XXe siècle, mûriers et vers à soie
continuent à occuper les habitants du village : une pesée officielle
des cocons a lieu tous les soirs de 4 h à 6 h, à partir du
15 juin. Un conseiller touche une indemnité de 30 francs pour s’en
occuper.
La garance, les cultures maraîchères.
Jean Althen introduit la culture de la garance dans le comtat (1760) et
celle-ci devient source de richesse jusqu'en 1870.
Sous Napoléon,
les anciennes mesures carombaises doivent être abandonnées.
On devra donc étalonner les nouvelles mesures au bureau de Carpentras
réservé à cet effet. Pour la garance, le safran, la
soie, l’huile (mars 1801) on définit de nouvelles mesures.
La
garance est cultivée principalement à Monteux, Sarrians et
Entraigues, mais aussi à Aubignan ou Mazan (1806).
Alors que cette racine se vendait jusqu’à 100 francs le quintal du
pays ( 42 kg), son prix baisse, sous Napoléon, jusqu’à 30
francs (1808).
En mai 1851, à Caromb, on interdit l’importation, sur le territoire
de la commune, de toute garance étrangère.
La garance n’est plus la seule teinture. Les produits chimiques permettent
de teindre à moindre coût. Au marché, le prix tombe de
76 francs les 100 kg de racines roses (1870), à 15 francs (1881). Les
cultures maraîchères progressent et utilisent les terres libérées
par l'arrêt de la culture de la garance. De 1.550 hectares en 1852,
elles vont passer à 5.860 hectares en 1913, dans le seul département
du Vaucluse [118].
La campagne carombaise au début
du XVIIIe siècle.
On protège les cultures [33] : protection des feuilles de mûrier,
interdiction de faire du bois, dans nos villages, avec amende proportionnelle
au moyen de transport utilisé.
Les fruitiers sont particulièrement bien protégés à
Caromb, St Pierre, Le Barroux, Mazan. Seuls les chefs de famille peuvent
vendre des fruits de la famille et les acheteurs doivent, eux aussi, répondre
à des critères précis.
On doit respecter une distance minimum pour les plantations, pour éviter
de faire ombrage sur les terres des voisins.
Pour le plaisir, citons quelques espèces de l'époque :
- - le pessegier (pêcher)
- - le gingoullier (jujubier)
- - le respié (néflier)
Les truffes.
Le pape Jean XXII a fait importer des truffes du Périgord (vers 1325).
Le marché de Carpentras est prospère (1760) : les truffes
se vendent bien, comme la lavande, et aussi les produits maraîchers.
Le produit de la fouille des truffes n’a qu’une importance minime à
Caromb (1893). Aussi n’est-elle affermée que pour un an (à
l’amiable), sur nos collines du Paty. Cependant, on réglemente
: la fouille n’est autorisée que sur des semis âgés d’au
moins 5 ans et elle ne devra être pratiquée qu’entre le 1er octobre
et le 30 avril pour les truffes noires, et entre le 1er juin et le 30 août
pour les truffes blanches.
Le tabac.
On cultive le tabac en Comtat de 1630 à 1734. Les trois occupations
françaises (1663, 1688-1689 et 1768-1774) avec leur blocus et les
droits de douane, désorganisent l’agriculture du Comtat. En particulier,
le concordat du 11 mars 1734 avec la France interdit la culture du tabac,
moyennant compensation. Le gouvernement français dédommage l’administration
comtadine et l’argent reçu est réparti entre les communes.
Caromb réclame et obtient sa part.
Irrigation, syndicat des eaux.
Le chapitre sur "de la bonne utilisation de l'eau" nous a déjà
présenté tout le travail effectué par nos ancêtres
pour l'arrosage des terres carombaises. Rigoles et canalisations sont entretenues
depuis le Moyen Âge. Nos archives décrivent tous ces travaux
depuis les captages, au bas des collines du Paty, jusqu'aux champs. Nous
avons vu aussi avec quelle énergie nos carombais ont défendu
leurs eaux, pendant des siècles, contre les prétentions carpentrassiennes.
Après 1761, le barrage du Paty et l’irrigation transforment l’agriculture.
Apparaissent les prairies, des vaches et la culture des haricots ; le Tian
de Fayot devient le plat traditionnel des Carombais, alors que l’on sème
les premières pommes de terre (1770).
Nous ne reviendrons pas sur la construction du barrage du Paty, lequel est
terminé et utilisable à partir de mai 1766. Cet ouvrage est
complété par tout un système de rigoles et de canalisations,
une extension de l'ancien système d'irrigation, pour fertiliser la
majeure partie des terres de la commune. Très vite le conseil municipal
s’aperçoit qu’il faut réglementer.
Ainsi le 24 Prairial, An XIII de la République, soit le jeudi 13
juin 1805, le préfet du Vaucluse approuve les 26 articles d’un Règlement
de Police pour l’irrigation du terroir de la ville de Caromb, proposé
par M. Lombard, maire et son conseil du 29 pluviose An XIII (lundi 18 février
1805). Il est spécifié que ce règlement est voté
"Afin de maintenir la paix et la tranquillité dans les campagnes,
afin de faire cesser l’anarchie qui règne dans le terroir dès
la saison des arrosages, afin de faire cesser les rixes et disputes continuelles".
Le 18 juin 1861, un nouveau projet est soumis à la Préfecture
du Vaucluse "ayant pour effet d’organiser en syndicat les propriétaires
intéressés à l’usage des eaux de Caromb". Le syndicat
est reconnu officiellement le 8 avril 1862 sous le titre de "Syndicat des
Eaux de Caromb" et comprend 35 articles. Sa direction est composée
de sept membres : deux du conseil municipal, trois parmi les propriétaires
des terrains arrosés, un parmi les propriétaires de moulins
et le maire de Caromb est directeur de droit.
En 1971, ce syndicat, plus que centenaire, possède à peu près
le même règlement et compte 270 adhérents pour 75 ha
de terres arrosées.
Nos agriculteurs savent qu’il n’est pas nécessaire de cultiver thym
et aspic, car on les trouve en abondance sur la colline du Paty, depuis toujours,
avec quelques pieds de lavande et quelques plantes médicinales, comme
l’arnica et la rue (rudo) [39]
Puisque l’on parle de la colline du Paty, signalons encore de belles jonquilles
(dans la deuxième quinzaine du mois de mars) [39].
Autres productions carombaises signalées en 1900 : les panaches à
balais. La commune en produit 50.000 kg, si nous croyons le poids public
!