Traditions de Noël : santons
et pastorales.
Dans notre région, la crèche s’appelle d’abord Nativita
ou Nativité. Attribuée à St François d’Assise,
elle apparaît autour de l’an 1500, à Avignon, sous forme de
sculptures en bois. Les Oratoriens de Provence, reliés par les Ursulines
et les Carmélites, propagent le culte de l’enfant-Jésus, puis
de la crèche de Noël dans les églises et couvents de leur
ordre.
Les crèches se répandent en Provence par les associations
pieuses, confréries et congrégations, en particulier par la
confrérie du Rosaire. En 1663-66, la confrérie du Rosaire de
Flassan fait sculpter une crèche en bois par Michel Péru, avec
au moins un Jésus, une Vierge et un St Joseph. La première crèche
en bois de Notre-Dame-des-Doms est antérieure à 1652. Mgr François
de Bertons de Crillon signale une crèche en 1699 à St Laurent
du Var.
Le menuisier Antoine Peirol (1709-1779) décrit la Nativité
et les moniales d’Avignon qui font leurs dévotions au « poupoun
», les compliments à « nosto Jacent » (la Vierge)
et « San Jousë ».
« Des églises, le goût des Nativités passa
chez les particuliers. Chacun voulut avoir la sienne et Dieu sait combien
Escudier, le figuriste célèbre et les chartreux de Bonpas ont
vendu d’Enfant-Jésus, des Vierges, des mages, des bergers, des bœufs
et des ânes aux amateurs de l’époque (
*119
) ». Marie Escudier (1742-1818), à Avignon,
fabrique des figurines de cire, activité reprise par le Carmel d’Avignon.
Le mot « santon » vient du provençal sant (saint) complété
du diminutif –oun : il signifie donc « Petit Saint », et, au
féminin, Santouno, petite sainte.
Les premières pastorales sont attestées dans la seconde moitié
du XVIIIe à Avignon et Marseille, autre forme de la Nativité
et survivance des drames religieux du Moyen Âge. Cette crèche
vivante apportera des personnages typiques du monde provençal comme
le maire (conse), le remouleur ( l’amoulaire) le bohémien
puis plus tard Pistachié (le niais), le Ravi (valet
d’écurie juste réveillé, qui s’étonne de tout),
Bartoumièu (vantard et aveugle) et les
commères villageoises Gueride, Roustido, Grasseto.
Pendant la Révolution, à Carpentras, le commissaire du pouvoir
exécutif du Vaucluse, L-H Lefébure signale en l’an II dans
un rapport que l’ « on a brûlé hier au soir devant
la maison commune cy-devant palais de l’évêque, les poupées
qui servaient aux fêtes de Noël à figurer les trois rois
(*120
) ». La Révolution, qui brûle
quelques santons, ne se doute pas que cette interdiction de représentation
de la naissance du Christ va propager les crèches dans toutes les
maisons comtadines et provençales, va faire la fortune de quelques
santoniers et sera une des coutumes les plus remarquables de notre pays.
Les santons de Caromb.
Dans un manuscrit daté de 1816, le potier carpentrassien Antoine
Denoves (1759-1843) a dressé le catalogue des craches (sic) ou nativités
des églises et maisons de Carpentras : 10 églises et 3 couvents
féminins (les Bernardines, les Ursulines et Visitation) ont leur
crèche et 21 crèches appartienent à des particuliers,
premières crèches domestiques. Les Etats pontificaux ont alors,
en matière de crèche d’église, une légère
avance sur la Provence.
Il est très probable que nos beaux santons carombais en cire soient
liés à la production avignonnaise et viennent de nos Ursulines.
Les lentilles de
la Sainte Barbe.
Le 4 décembre, jour de la Sainte Barbe, suivant une tradition millénaire,
les enfants sèment des grains de blé ou des lentilles, dans
une soucoupe remplie d’eau. Les grains ayant germés, la soucoupe
orne souvent la crèche de Noël [133].
La vie de jadis.
"Prendre
le frais".
Depuis
toujours dans nos communes rurales, après le dur travail des chaudes
journées d’été, les Carombais profitent de la fraîcheur
des soirées en sortant s’installer dans les rues ou sur les places
du village. Quelques familles voisines sortent leurs chaises et se regroupent
pour discuter, de manière conviviale, en attendant que la température
tombe un peu, que les premiers souffles d’air rendent l’atmosphère
plus respirable, avant d’aller se coucher. Les enfants jouent au cerceau,
aux billes, à la toupie, les anciens racontent leur vie, les femmes
échangent les dernières nouvelles pendant que leurs hommes
poussent jusqu’au café tout proche.
Chanson carombaise : Irénée
Agard (1878-1944)
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Li Flours
dé Caroun.
I
Din li roucas, su la maïgro
mountagno,
Lou barjea voun flouris en liberta
Soun blu régar semblo
béouré l'igagno,
Coume ùn souffran qttén
la Carita.
…
Pichouno flour ignorado di foulo,
Toun fin parfùn nous qttiro
ver tu;
Su la mountagno amé la
férigoule,
Pu haou qu'ùno piboulo,
Vésinés lou ciel
blueL.
II
Din li gran pra, pertout lon
di sourso,
La marguerito, espandis è
s'éndor…
Coumé ùno estello
esgarado én sa courso,
D'ùn voilo blan escoun
li boutoun d'or.
…
Neigeo d'estiéou qué
cantoun li cigalo!
Din la verduro estalés
ta blancour…
Piéi li fillettoà
l'âmo provénçale,
Esffeuilloun ti pétalo
Coumé ouraclé d'amour.
III
Din li silloun, li vergié,
lis estoubl,
Lou gàu-galino espélis
à gran clos…
Soun cœur dé san nous
souris è nous troublo,
Piéi nous rappelle à
nosti chers héros.
…
Vago dé san, symbolo dé
victoiro!
Nous as grandi ! Nous as fa li
maï fort!
Rougeo coulour ! én margeo
dé l'Histoiro,
Nous marqués plén
dé gloiro
Lou souvéni di morts.
IV
Souvageo flours qué pas
ùn bras cultivo,
Sias coumé ùn doun
arriva dou bon Diéou…
Enlacés vous é
restés toujour vivo
Din lou bouquet qu'amén
touti lou miéou.
…
O ! très coulours ! qué
toun Caroun adoro,
Nous réflétés
pertout is énviroun !…
Vésén en vous lou
drapéou tricolore,
Coumé un souléou
qué doro
Lou clouché dé
Caroun !
Caromb, mars 1921
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