Mise à jour 4/05 Copyright JG © 2005

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 Castellar et de l' Escarton de
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Chapitre X.    DESASTRES NATURELS EN CASTELLATA.
Eboulement à San Eusébio.

        En remontant la vallée Varaita, à Casteldelfino, on traverse aujourd’hui les premières habitations de la commune et on gagne les sommets du lieu par un chemin tortueux qui passe sur le côté de Caldanes où dans un virage se trouve la petite chapelle de Saint Bernard construite sur le versant méridional de la rivière Varaita, assez près de la ville, devant une montagne haute et pointue qui coupe la vallée. Cette pointe, appelée Giuglietta, était double jusqu’à la fin du XIVe siècle. La seconde pointe, au nord, était parallèle à la première et de même importance. 
        Fin septembre 1391, cette pointe s’écroula au fond de la vallée, dans un bruit infernal, et un nuage de poussières. Le torrent Varaita fut arrêté au lieu de la Valleta de Pontechianale. Cet énorme éboulement en forme de triangle mesurait 1.500 mètres de large et s’étendait jusqu’à  la rive opposée. Pendant plusieurs jours la Varaita ne coula plus, jusqu’à ce que l’eau resurgisse et se déverse sur le bassin actuel de Casteldelfino. Dévié de son cours normal, l’eau tourna vers le sud et immergea les prés de la chapelle actuelle de San Eusébio et emporta la ville antique. La tradition et la littérature ne donnent pas d’informations sur d’éventuelles victimes de cette inondation et nous pouvons supposer que devant le péril imminent les gens ont eu le temps de quitter leurs maisons et de récupérer leurs biens, mobilier ou outils. L’église paroissiale fut traversée par les eaux (35)
 


L'église (XIIe siècle) de St Eusèbe.


Son clocher.


Porte romane.

        Les habitants portèrent leur choix, pour construire une nouvelle ville, sur le bourg de Magdellena, présentant une meilleure sécurité. Ainsi naquit l’actuelle ville de Casteldelfino. 
        Chacun se mit à reconstruire sa maison. L’entre-aide devait être la règle, devant tant d’adversité. 
        Ce nouveau bourg remplaça la vieille ville et on garda, comme patron, St Marguerita. 
        Parmi les édifices détruits se trouvait le four public, emporté par les eaux. Propriété du dauphin, et sujet à taxes, le châtelain de la ville, Pietro de Neuvacha sollicita le gouverneur du Dauphiné pour reconstruire un nouveau four. Mais gouverneur, conseil delphinal et Chambre des Comptes trouvèrent qu’il était bien cher de se lancer dans cette construction et décidèrent, par décret du 20 septembre 1391, que les habitants du lieu paieraient annuellement au châtelain un florin d’or de grand poids et qu’en échange, ils seraient dispensés du droit de cuisson du pain. 
        Les habitants payèrent cette somme pendant des années, puis se résolurent à faire appel de cette décision, justifiant l’appel par le fait qu’ils n’avaient pas le choix et que cela était injuste. 
        L’acte d’appel est en Annexe. L’original est aux archives de Grenoble, année 1397, et fut présenté à la Chambre delphinale par le châtelain de Casteldelfino ( LB N 2995, fol XII) 

        Si cet éboulement a marqué la Castellata, l’événement reste local. Nos montagnards des Alpes en ont connu d’autres : pour citer les principaux éboulements des Alpes, celui du mont Granier (1248) a marqué son temps avec quatre mille morts, sept paroisses détruites, 500 millions de mètres-cubes de roches éboulées sur 24 kilomètres carrés. Beaucoup plus tôt, l’histoire nous raconte un éboulement dans le lac Léman en 563 si important qu’il fit monter les eaux du lac, noyant tous les villages côtiers, emportant le pont de Genève et beaucoup de ses maisons et de ses hommes. En 1176, en vallée d’Aoste, le village de Donnas est détruit. En 1227, de terribles séismes frappent les Alpes du Sud ( 5.000 morts). Quant aux crues, citons l’inondation de Grenoble en 1219, due à la rupture du barrage naturel du lac d’Oisans formé depuis 1191 ou celle d’Aoste en 1284. En 1449, la Doire ravage à nouveau Aoste ; Chambéry est inondée en 1348 et 1349. 

Thomas II de Saluces.

        Le 10 mai 1390, la sentence du parlement de Paris, dans le conflit entre marquis de Saluces et comte de Savoie est rendue en faveur du marquis et la Savoie doit rendre les terres et châteaux occupés. Mais dès  1394, le maquis envoie son fils aîné Thomas au secours d’un monastère assiégé par un prince d’Achaïe, Amédée de Savoie. Lors du conflit armé, Thomas est fait prisonnier et est conduit à Savigliano, puis à Turin. Prisonnier pendant deux années, il est libéré contre une rançon de 20.000 florins d’or, sur l’intervention du gouverneur du Dauphiné Jacques de Montemauro et du gouverneur d’Asti, le marquis Inguerra. Avant de mourir, Fédérico II a la joie de revoir son fils. 
        Homme pieux, il favorisa l’Eglise et les monastères : on lui doit la réédification du château de Verzuolo, un des plus beaux monuments du Piémont datant du Moyen-Âge, et la restauration du campanile de l’Eglise St Jean de Saluces. 
        Il meurt en 1396, à 64 ans, laissant son épouse Béatrice de Ginevra et 9 enfants, 6 fils et 3 filles. Parmi eux, Thomas, fils aîné lui succède et Amédée devient évêque de Valenza, puis cardinal, et enfin pape sous le nom de Martin V. 

        En 1391, Thomas, troisième de ce nom, devient marquis à 40 ans. Son premier soucis est de consolider son pouvoir et de se prémunir contre le prince d’Achaïe qui cherche le moindre prétexte  pour agresser le marquisat. Ce dernier agresse aussi le marquis de Montferrat et un accord d’alliance est signé entre Saluces et Montferrat, pour contenir ce  prince trop remuant. 
        Thomas III est généreux  envers les églises et les hôpitaux, comme pour ses sujets : il allège  les impôts, accorde de nouveaux privilèges et des libertés, particulièrement pour ceux qui ont participés à la défense du territoire. Il gère son état et améliore par décret l’administration judiciaire ou assure l’unité des poids et mesures du marquisat, améliorant le commerce interne. 
        Les communes obtiennent de lui la confirmation des franchises : le Val Macra rachète concessions et franchise, la Castellata se voit confirmée dans ses libertés précédentes. A cette fin, les trois communes de la Castellata envoient comme ambassadeurs Martino Donadéi, recteur et curé de l’église d’Acceglio et Pietro Morel de Pont. Reçus par le marquis et sa cour, le 5 juin 1398, dans les jardins de l’église St Jean de Saluces, en présence des nobles et autres personnalités, ils obtiennent tout ce qu’ils demandent. Encore une fois, ceci nous est raconté dans un acte en latin donné en annexe. 
        Thomas a de bonnes relations avec le roi de France, Charles, et après la sentence du tribunal de Paris, souhaite passer à l’exécution de cette sentence. Il rend hommage au dauphin, le 11 février 1400, et devant la résistance du comte de Savoie, se porte en personne à la cour du roi de France pour obtenir son appui. 
        La France, à ce moment là, est agitée par le conflit des parties du duc de Bourgogne et du duc d’Orléans pour gérer les affaires du royaume français, et le roi Charles est dans l’incapacité de décider. 
        D’autre part, le marquis de Savoie a ses propres appuis à la cour de France, et Saluces n’arrive pas à obtenir le secours escompté. Thomas prolonge son séjour à la cour, en profite pour apprendre le français, les sciences et s’intéresse aux œuvres d’art et aux livres. Plus homme de lettre qu’homme d’armes, c’est une personne instruite. Il compose d’ailleurs un roman historico-moral, « le Chevalier errant ». Son exemple sera suivi par ses descendants qui auront comme principe d’être cultivés, lettrés et de s’intéresser aux sciences. 

        Le marquis Thomas avait eu trois fils adultérins d’une dame que sa condition lui interdisait d’épouser : Valériano, Lanzarotto et Gioanni. Le temps passant, il souhaite avoir un successeur légitime. Lorsqu’il revient en France, à nouveau pour obtenir l’appui de la France et aussi pour une nouvelle dispute, liée à l’hommage, avec la Savoie devant le parlement de Paris, il en profite pour demander la main de Marguerite, fille du comte Ugo di Roussy. Il l’épouse en 1403. 
        Il obtient encore une sentence favorable du parlement sur la question de l’hommage et une demande d’exécution, par les armes s’il le faut. Il revient à Saluces en 1405, espérant la paix.


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