Eléments de généalogie
I. Esprit-Jean-André Robert, médecin x Blanche de Bruges.  
II. Louis Benoît Robert 7/3/1772 Ménerbes-16/6/1831, s.a., il quitte Menerbes en 1792 pour fe faire soldat, il n'est revenu dans ce pays pour l'habiter qu'en 1825 : général de brigade en 1811, gouverneur de Valence et de Tortose, Commandeur. L.H., baron d'Empire par lettres patentes du 10/4/1811, Ch de Saint-Louis. Il adopta son neveu, Louis Vincent Benoît
II. N Robert
III. Louis Vincent Benoît Robert, dit le baron Robert, ° 1816, sous-préfet, Ch L.H..
III N Robert + 1854
I  N Robert, prêtre à Pipriac (Ille-et-Vilaine)

La carrière du baron d'Empire :
Il est nommé, le 3 août 1792, à Soissons, capitaine de grenadiers dans le 92e régiment de ligne.
En 1792 et 1793, Robert fait partie de l'armée de la Moselle. En 1793, il est à l'armée du Nord.
Il se couvre de gloire au village de la Roux le 26 juin 1794, et à Welvcsert le 19 septembre 1794. Le général Bernadotte fait à son armée l'éloge de Robert : il loue et son courage et son instruction et son dévouement sans bornes à la patrie.
Ce capitaine sert pendant les années 1794, 1795 et 1796 à l'armée de Sambre-et-Meuse qui a été commandée par Jourdan et Hoche.
Il est en Allemagne en 1797 sous les ordres d'Augereau, puis en 1798 et 1799en Italie.
Le 6 germinal an vu (20 mars 1799), au siége de Vérone, il est atteint d'une balle à la tempe gauche. ll tombe à terre et pendant quelques instants, ne donne aucun signe de vie. On le croit mort; il revient enfin à lui. Robert fut dangereusement blessé sous les yeux mêmes du général Victor qui l'estimait beaucoup et qui, après qu'il fut guéri, lui confia l'emploi de rapporteur du conseil de guerre de sa division et la mission de se rendre à Nice pour y relier et conduire au quartier-général, à Port-Maurice, tous les soldats qui avaient déserté son armée.
En 1799, le capitaine Robert est appelé au commandement de l'arrondissement d'Apt (Vaucluse). Il occupe ce poste peu de temps. En le quittant, il reçoit les éloges du maire et des adjoints de cette ville petite, mais jolie et curieuse à voir.
L'an IX (1800), il fait partie de l'armée de l'Ouest que commande le général Bernadotte.
Le 15 brumaire an IX (6 novembre 1800), il est nommé rapporteur près le second conseil de guerre de la 22e division.
Le capitaine Robert est, l'an X (1801), à l'armée de la Gironde qui a pour chef Leclerc.
Il se trouve à l'armée de Batavie, sous les ordres de Victor, l'an XI (1802). Il est nommé capitaine de recrutement dans le département de la Côte-d'Or.
Napoléon détruit à Austerlitz les armées russe et autrichienne. Robert adresse à l'Empereur une ode remarquable pour le complimenter. Napoléon lit cette œuvre, l'admire et en félicite l'auteur.
Bien que capitaine-chef de recrutement dans le département de la Côte-d'Or, Robert n'en fait pas moins les campagnes des ans XII et XIII (1803 et 1804) au camp d'Utrecht sous Marmont, de l'an XIV (1805) à l'armée du Nord sous le prince Louis et de l'année 1806 au 2e corps de la Grande-Armée, sous les ordres du général Baraguey-d'Hilliers.
Robert sert pendant quinze ans comme capitaine dans le même corps avec distinction et valeur ; il est partout où il y a du danger. On est certain de le trouver toujours sur le chemin de l'honneur. Ses camarades et amis, vivement peinés de voir que ses talents et son courage ne sont pas récompensés, écrivent au ministre de la guerre pour demander la croix d'honneur pour lui. Robert, qui est. la modestie même, a connaissance de cette lettre. II en remercie ses auteurs et obtient qu'elle ne soit pas envoyée à son adresse.
Pendant son séjour à Dijon, il se fait admettre au nombre des francs-maçons. Il obtient le grade insigne de rose-croix et remplit les fonctions d'orateur.
Le 30 mai 1807, il est nommé chef de bataillon au 70e régiment de ligne. Il fait la campagne de l'année 1807 au 2e corps de la Grande-Armée que commande le général Baraguey-d'Hilliers ; il sert ensuite sous les ordres du général Junot. Dans les derniers jours de 1807, il est envoyé avec son bataillon à Saint-Jean-Pied-de-Port et se trouve sous les ordres du général de division Mouton, aide-de-camp de l'Empereur, plus tard si justement célèbre sous le nom de Lobau. Obligé de quitter sa division pour un autre poste, ce général en laisse le commandement au chef de bataillon Robert. C'est peut-être la seule fois qu'on ait vu toute une division obéir à un chef de bataillon et suivre ponctuellement chacun de ses ordres.
L'Empereur déclare la guerre à l'Espagne. Robert entre dans ce royaume. Il est sous les ordres du général Moncey. Il se fait remarquer à Madrid, à Tudela, à Valence et dans la Navarre ; il s'empare de Tarazona et sa valeur nous rend maîtres de Pampelune.
Robert se distingue au premier siége de Saragosse. Le premier, il entre dans cette ville et parvient à s'y maintenir ; il fait partie de la brigade commandée par le général Grandjean.

Robert est nommé colonel à la suite du 70e régiment, le 27 juin 1808. Le général Lefebvre-Desnoëttes lui écrit ainsi :
« Je vous adresse, mon cher commandant, votre » nomination au grade de colonel. Je vous félicite » bien sincèrement sur cette marque de la bienveil* lance de l'Empereur que vous avez méritée par » votre conduite et votre intrépidité. »
Pendant qu'il était capitaine, Rohert a souvent commandé et conduit à la victoire un bataillon. Commandant, il a eu maintes fois sous ses ordres plusieurs bataillons et, pendant quelques mois, une division. Colonel, il a commandé à plusieurs régiments. Nous verrons plus tard que, bien qu'il ne fût que général de brigade, il n'en a pas moins eu le commandement de la division du Bas-Èbre. Cet officier supérieur n'a jamais été lieutenant-colonel ; il n'a été que capitaine (on sait qu'il a débuté par là), chef de bataillon, colonel et général; il n'a ainsi occupé que quatre emplois. S'il est resté longtemps dans l'oubli, les honneurs et les dignités vont maintenant pleuvoir sur lui; il réparera le temps perdu. Le 29 mai 1807, il était encore capitaine et le 6 juillet 1811, quatre ans après, il sera nommé général.Quel avancement rapide! Ajoutons qu'il fut juste, mérité et approuvé d'un chacun.
Le siége de Saragosse continue. Robert a pour général de division Verdier et pour général de brigade Darmagnac. Le général Verdier fait enlever par le général Lefebvre-Desnoëttes les positions extérieures de Saragosse. Robert s'illustre dans ce combat: il est partout où sa présence est utile. Son courage et ses talents font l'admiration de tous.
Le 31 juillet 1808, Robert est nommé chevalier de la Légion d'honneur.
L'assaut esl donné à Saragosse. Le colonel Robert pénètre dans cette ville, s'empare de quelques maisons et se couvre de gloire. Le 5 août 1808, il est blessé d'un coup de feu à la jambe gauche.
Le 28 octobre 1808, Robert est appelé au commandement du 117e régiment de ligne. Ce corps fut formé à Xarès-sur-l'Èbre, le 7 juillet 1808, du 9e régiment provisoire de l'armée d'Espagne. Robert fut le premier et, ne craignons pas de le dire, le plus remarquable de ses colonels.
Saragosse est attaquée de nouveau. Le colonel Robert s'immortalise au siége de cette ville et contribue puissamment à sa prise; il commande la 2e brigade.
Le 117e régiment a beaucoup souffert au siége de Saragosse : il y a perdu 557 hommes, plus du tiers de son effectif. Son équipement et son habillement laissent beaucoup à désirer. Ce corps a besoin d'être complétement réorganisé.
Le 15 juin 1809, le général Suchet en vient aux mains avec le général espagnol Blake près le village de Maria. Cette bataille dure longtemps. Vers midi, Robert arrive, à la tête des 116e et 117e régiments, à hauteur de Saragosse et nous rend victorieux. 25 canons et 3 drapeaux tombent en notre pouvoir.
Ce colonel se l'ait remarquer à la bataille de Belchitte qui a lieu le 18 juin 1809, et, quelques jours après, à la prise du fort de Monzon, le 23 du même mois.
A la tête de son régiment, Robert disperse de nombreuses troupes de guérillas.
Des bandes espagnoles, au nombre de 3,000 hommes et sous les ordres de Perrena, se réunissent à Médiano le 2 septembre 1809. Le colonel Robert, avec deux bataillons de son régiment et les deux qui sont à Jaca, attaque cet ennemi ; il le culbute, lui tue beaucoup de monde, lui prend un magasin de cartouches et le rejette jusqu'en Catalogne.
Dans cette même année et au mois de septembre, Robert est entouré d'une bande d'insurgés espagnols, ïl n'a avec lui que peu de troupes, mais son courage est grand, aussi, après leur avoir fait bien du mal, il les met en fuite. Les journaux ont raconté cet acte de bravoure et fait le plus grand éloge du colonel Robert.
Le général Suchet met à l'ordre du jour ce grand homme de guerre ; il loue son courage, sa capacité et le cite en exemple. Cet officier supérieur a eu souvent l'honneur insigne de voir son nom et ses hauts faits mis à l'ordre du jour.
Le 23 seplembre 1809, Robert marche de nouveau contre l'ennemi et a besoin d'employer un stratagème pour le faire sortir d'une position inattaquable. Après quelques escarmouches, il feint de se retirer et attire les insurgés à sa poursuite, puis, se retournant avec rapidité, il les atteint et en culbute le plus grand nombre.
L'armée française s'empare du fort de Vénasquei Le colonel Robert s'y fait remarquer
On assiége Lérida, Le colonel Robert monte à l'assaut de Lérida et pénètre dans cette ville. Le 12 avril, devant cette place, un boulet de canon le blesse au bras droit et emporte la cuisse droite du cheval qu'il monte. Cette blessure fut bientôt cicatrisée; quant au cheval, il est immédiatement abattu pour abréger ses souffrances. Le siége de Lérida est une des belles pages de la vie si glorieuse du colonel Robert ; il y fit preuve à la fois d'une haute capacité et d'un courage extraordinaire. L'Empereur le récompensa en le nommant, le 29 mai 1810, officier de la Légion d'honneur.
Le général Suchet investit la place de Tortose le 3 juillet 1810. Le colonel Robert bat O'Donnell, le met en fuite, le poursuit pendant deux lieues, et, grâce à son courage, cette ville ne tarde pas à tomber en notre pouvoir.

Le 7 août 1810, Sa Majesté le nomme baron de l'Empire. Ses armoiries sont : écartelé, au premier d'azur, à deux chevrons d'or; au deuxième, des barons tirés de l'armée ; au troisième, de gueules, à la tour crénelée d'or ; au quatrième, bandé d'azur et d'argent, au lion de sable en abîme brochant sur le tout. Ces belles armoiries sont en partie celles d'Espagne. Le décret qui nomme cet officier supérieur baron de l'Empire dit que ce titre lui est donné comme une récompense destinée à perpétuer dans sa famille le souvenir de ses glorieux services.
L'Empereur accorde, le 7 août 1810, à Robert, sur les domaines du Hanovre, une dotation du revenu de /j,000 francs, dont la jouissance remontait au 1" juillet de la même année.
Le 9 janvier 1811, ce colonel se distingue à la prise du fort Saint-Philippe, au col de Ballaguer. A la tête de son régiment, il monte à l'assaut de ce fort et met à mort ou en fuite tous ceux qui lui résistent.
Un audacieux Espagnol, Rambla, est à Beceyte, dans la chaîne de montagnes qui sépare l'Aragon de la Catalogne ; il est à la tête de 600 hommes déterminés comme lui. Il inquiète nos troupes; il tue de temps à autre quelques-uns de nos soldats et enlève les convois confiés à de faibles escortes. Le colonel Robert forme le hardi projet de détruire la bande que commande ce guérilla; il soumet son plan de campagne au général Suchet qui l'adopte. En conséquence, le 23 janvier 1811, il marche contre Rambla. Pour arriver à Beceyte, il faut passer par des sentiers étroits, escarpés, taillés dans le roc et qui ne sont vraiment praticables qu'aux chèvres et aux mulets dont le pied est si sûr. Rambla et sa troupe sont armés jusqu'aux dents et bien décidés à faire payer cher leur vie. Établis sur un point élevé et. bien fortifié, ils voient au loin de toutes parts. On ne peut les surprendre ; ils ont toujours les yeux fixés sur les endroits par où on peut venir les attaquer. Le colonel Robert est a la tête de 300 hommes courageux et décidés comme lui. Rambla l'aperçoit et fait feu sur nos soldats; ils ne s'épouvantent pas et continuent leur marche. Ils atteignent enfin ce valeureux guérilla et sa bande. Un combat corps à corps a lieu. Les Espagnols ne tardent pas à être mis en fuite; ils ont perdu un grand nombre des leurs. Rambla s'échappe : on brûle Beceyte.
Robert campe à Perello avec son régiment. Le 3 mars 1811, à quatre heures du matin, le général Campoverde l'attaque à la tête de 6,000 hommes; le colonel français n'en a que 2,000 à lui opposer. Ces braves battent en retraite avec sang-froid, quoique entourés, et repoussent plusieurs charges de cavalerie. Les généraux Habert et Bronikowski, avertis du danger que court le 117% accourent à son secours. Ils viennent deTortose; ils ont avec eux le 116% des cuirassiers et quelques pièces de canon. Le brave 117° soutient jusqu'à leur arrivée un combat inégal. Nos ennemis sont vaincus et nous abandonnent le champ de bataille.
Le 3e corps rentre en Aragon ; ii cesse d'être à charge à la France, il se nourrit dans le pays qu'il occupe et qu'il a soumis, mettant ainsi en pratique cette maxime : L'art de vaincre n'est rien sa7is celui de faire subsister les troupes.
Le colonel Robert s'immortalise, le 29 mai 1811, à la prise du fort l'Olivo et au siége de Tarragone. Il monte à l'assaut de cette ville. Rien ne résiste à sa valeur et à son impétuosité. Tarragone tombe en nos mains victorieuses.
Robert a été admirable dans la prise de Tarragone. Quel sang-froid merveilleux, étonnant! On ne peut être plus brave et plus capable. Les journaux parlèrent fort au long de la prise de cette ville. A Menerbes, on lut un dimanche, sur la place publique, au sortir de la messe, le rapport du général Suchet sur ce beau fait d'armes, et chacun des compatriotes du colonel Robert applaudit à l'intrépidité de cet officier supérieur et fit des vœux sincères pour son bonheur et son avancement. Ce jour-là surtout Menerbes s'estima fier et heureux d'avoir donné le jour à ce brave.

Le 6 juillet 1811, le même jour qu'il fut nommé général, il reçut une seconde dotation; elle était de 2,000 francs de rente et les biens dont elle provenait situés dans le département de la Stura. La rivière de Stura coule à cette heure dans les États du roi de Sardaigne. Robert jouit de cette dernière dotation à partir du 1er de ce mois.
Le 23 septembre 1811, la division Habert dont fait partie la brigade Robert attaque Murviedro et s'en empare, bien que la garnison de Sagonte vienne à son secours et défende cette ville avec valeur et talent. Le général Robert se distingue au siége de Murviedro.

Le général Robert contient et repousse à plusieurs reprises la division Obispo qui s'est avancée par la route de Naquera et menace notre flanc pour pénétrer dans le défilé de San-Espiritu. L'armée de Blake fut complétement défaite à la bataille de Sagonte.

L'armée française, sous les ordres du maréchal Suchet, fait le siège de Valence ; elle s'en empare le 9 janvier 1812. Le général Robert s'y distingue; il a acquis de nouveaux titres de gloire, aussi est-il nommé gouverneur de cette ville. Le chef de bataillon Bugeaud commande les troupes sous ses ordres.
L'Empereur, voulant récompenser le sage et habile gouverneur de Valence, l'élève au grade de commandeur de la Légion d'honneur par décret en date du 16 mars 1812.

Les fatigues de la guerre, les nuits passées sous la tente et les blessures qu'il a reçues rendent malade le général Robert : il a une goutte rhumatismale ; il en souffre beaucoup ; il devait un jour en mourir. Au mois d'avril 1812, il se rend en France pour prendre les eaux de Ragnères.

A peine rétabli, et il le fut au bout de quelques mois, il se hâte de retourner à Valence et de reprendre le commandement. de cette ville ainsi que de ses environs; il avait été remplacé provisoirement par le général baron IVIazzuchelli, homme capable et courageux. Le général Robert eut l'honneur, en qualité de gouverneur de Valence, d'avoir pendant quelques jours pour hôte le roi Joseph. Ce prince malheureux avait une profonde estime pour cet homme de guerre ; il eut toujours à se louer de lui : aussi aimait-il à en faire publiquement l'éloge. Nous croyons être dans le vrai en disant que la plus belle position qu'ait jamais occupée le général Robert a été le commandement de Valence. L'homme le plus capable eût été heureux et fier d'avoir un emploi aussi honorable et où il pouvait rendre d'aussi grands services.

Le général Robert se fait remarquer aux batailles d'Àlicante, de Biar et de Castalla. On livra la première de ces batailles le 8 octobre 1812, la deuxième le I2 avril 1813, et la troisième le lendemain.

Le 17 juillet 1813, Robert est nommé gouverneur de Tortose, et commandant de la division du BasÈbre. Tortose est la plus importante de toutes les places que l'armée française possède en Espagne en 1813. Napoléon tient beaucoup à cette ville à cause des bouches de l'Èbre ; il ne veut conserver dans la Catalogne que celte place. Sa garnison est de 3,723 hommes; elle a 240 bouches à feu dont 120 en batterie et approvisionnées à 500 coups chacune. Elle a des vivres qui peuvent suffire pendant quelques mois à 6,000 bouches. Le maréchal Suchet laisse au général Robert 580,000 francs pour la solde des troupes et pour d'autres dépenses. Il y a dans celte place 100,000 kilogrammes de poudre et 800,000 cartouches. On y a laissé 1,400 blessés, malades ou estropiés. D'après l'ordre du maréchal Suchet, Tortose est déclarée en état de siége et le général Robert réunit tous les pouvoirs civils et militaires dans cette place et dans l'arrondissement de ce nom.

Bien que bloqué par 15,000 hommes, cet officiergénéral ne cesse de sortir de Tortose pour faire des approvisionnements. Il bat les ennemis qu'il rencontre; ils ne peuvent l'intimider ni par leur nombre, ni par leurs menaces, ni par leurs lettres insolentes.
Napoléon, lâchement abandonné par les hommes qu'il a comblés d'honneurs et de richesses, abdique le 11 avril 1814 et part pour l'île d'Elbe. Louis XVIII débarque à Calais le 23 de ce mois et fait son entrée solennelle à Paris le 3 mai. Les Bourbons régnent de nouveau sur la France. L'Empereur est dans l'exil. Le drapeau blanc flotte sur les Tuileries. Tortose est encore au pouvoir de l'armée française ; le drapeau tricolore orne les forts de cette ville.

En vertu d'un traité de paix, la place de Tortose est remise aux Espagnols le 18 mai 1814, à quatre heures du matin. Nos soldats en sortent avec les honneurs de la guerre; ils emportent tout ce qui leur appartient, et leurs ennemis les respectent et les admirent. Nos troupes se dirigent sur Perpignan. Elles arrivent dans cette ville le 1" juin sans avoir perdu un soldat et brûlé une amorce, bien qu'elles n'aient cessé d'être entourées d'ennemis nombreux, irrités au dernier point, farouches et cruels. Notre courage leur en impose tellement que plusieurs corps d'armées leur portent les armes et demandent comme une grâce et l'obtiennent d'être passés en revue par le général Robert.

La défense de Tortose est un de nos beaux faits d'armes; c'est la plus remarquable page de la vie illustre du général Robert. C'est dans cette ville qu'il lui a été donné de faire preuve de plus de talent. A Tortose, il a su montrer, par sa correspondance avec les généraux ennemis, qu'il était un écrivain distingué, incisif, mordant, spirituel et plein de bon sens; par les nombreuses victoires qu'il a remportées, que ses connaissances militaires étaient étendues et profondes et sa valeur immense ; en déjouant les piéges qui lui étaient tendus, que sa prudence était grande ; et en pourvoyant à tous les besoins de ses soldats, qu'il était un sage, éclairé'et habile administrateur. Il n'est pas de maréchal de France qui ne fût heureux et fier d'avoir aussi bien défendu Tortose. Dans cette ville, le général Robert commanda en maître; il ne reçut d'ordre de personne, il fut livré à lui même; il ne puisa ses inspirations et sa règle de conduite que dans son cœur, son courage, son expérience éclairée et son amour pour la patrie. L'Empereur, qui se fait rendre compte de tout, qui n'ignore rien et se plait à récompenser le vrai mérite, dit au maréchal Suchet, en 1815, après avoir su par lui la défense de la place dé Tortose : Le général baron Robert s'est couvert de gloire à Tortose; il aura une page dans l'histoire (1). La défense de Tortose est aussi belle que celle de Fontarabie par Daillon de Lude, dans les années 1521 et 1522. En 1813, les places de Hambourg et de Danlzig n'ont pas été mieux défendues par le maréchal Davoul et le général Rapp.
A son arrivée à Perpignan, Robert reçoit ordre de prendre le commandement de la frontière et du département des Pyrénées-Orientales.
Le 13 août, il est nommé chevalier de Saint-Louis.
Napoléon confirme le général Robert dans le commandement du département des Pyrénées Orientales le 15 avril 1815.

Trahi et vaincu à Waterloo, Napoléon quitte de nouveau la France. Le 6 juillet 1815, les Bourbons viennent s'asseoir sur le trône de leurs pères; ils laissent au général Robert son commandement. Aucune goutte de sang n'est versée dans cette partie de la France. L'ordre et la tranquillité la plus grande y régnent. Robert fait reconnaître l'autorité du roi et arborer le drapeau blanc. Cet acte de soumission préserve le Midi des horreurs de la guerre.
Le 1" septembre 1815, le général Robert est remplacé dans le commandement du département des Pyrénées-Orientales et mis en disponibilité.
Mis en non activité le 1er janvier 1816, il se rend à Avignon et habite cette ville.
Le 16 juin 1819, il est nommé inspecteur dans le 8' arrondissement d'infanterie dont le chef-lieu est Marseille; il passe ensuite dans le 9e arrondissement, chef-lieu Montpellier. Les légions qu'il doit inspecter sont celles des Basses-Alpes et Basses-Pyrénées à Nîmes, et celle de la Lozère à Avignon. Bien que malade et souffrant, Robert ne s'acquitte pas moins avec zèle des nouvelles fonctions auxquelles il vient d'être appelé..
Le général Robert est mis en disponibilité le 1" janvier 1820.
Par ordonnance, il est admis à la retraite à compter du 1" janvier 1825. Sa pension est fixée au maximum de 4,000 francs par ordonnance royale du 16 février 1825.
Après avoir demeuré quelques années à Avignon, Robert se rend à Menerbes, en 1825, pour en faire son séjour. Ce pays lui a toujours été cher, il l'aime comme une mère son enfant. Il s'y occupe d'agriculture et surtout d'horticulture. Comme le grand Condé, il aime à cultiver des roses et à en respirer I.e doux et suave parfum. Il détruit l'usure, ce vol infâme, se livre de temps à autre au plaisir de la chasse, vient au secours de tous les malheurs, de toutes les infortunes et lit, médite et s'instruit.
Le général Robert mourut d'un accès de goutte remontée ; il rendit le dernier soupir à six heures du matin, le 16 juin 1831, à l'âge de cinquante-neuf ans.

Source : Le Spectateur militaire: Recueil de science, d'art et d'histoire ...: Volume 1858  par Jean Maximilien Lamarque, Franciois Nicolas Fririon (baron)....